Le blog de Lizzie Crowdagger

Ici, je discute écriture et auto-édition, fanzines et livres numériques, fantasy et fantastique, féminisme et luttes LGBT ; et puis de mes livres aussi quand même pas mal
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Elle est choquée par les enseignants qui jettent leurs livres ; ses raisons vont vous surprendre !

, 22:53

Pour protester contre la réforme des retraites, des enseignants ont jeté des manuels scolaire, dans la foulée d’autres professions, comme les avocats qui avaient jeté leur robe. Si l’action a été contesté par un certain nombre d’internautes et d’intellectuels dénonçant l’affront et la désacralisation faite aux livres, c’est pour de toutes autres raisons que Lizzie C. s’offusque :

« Je ne comprends pas l’intérêt de faire grève si c’est pour faire du travail gratuit. Est-ce que moi je fais grève en donnant des cours gratuitement ? ».

Lizzie est en effet stress-testeuse de livres. Une profession nouvelle, mais auxquels les éditeurs recourent de plus en plus pour évaluer en amont la solidité de leurs ouvrages.

« On commence par brûler des livres, explique-t-elle, et ensuite on fait un rapport détaillé sur la manière dont le feu s’est propagé, les odeurs émises, si cela a émis des fumées toxiques. »

Ses prestation dépendent cependant des éditeurs : certains ne prennent que le forfait de base, qui n’assure que le minimum vital en terme de solidité.

« Le jet de livres, c’est nécessaire, mais ce n’est pas suffisant. Déjà, il faut le jeter correctement, éviter de l’envoyer à l’horizontal et fermé, mais s’assurer qu’il s’ouvre et que les pages volent dans tous les sens. Mais, honnêtement, à part ceux qui ont une reliure vraiment minable, ce n’est pas là qu’on détecte soucis de solidité. »

Lizzie ne travaille pas seule : elle est épaulée par son chat.

« Les pages d’un livre ne résistent jamais aux griffes d’un chat qui s’enthousiasme dessus, mais il y a d’autres facteurs. Il y a des odeurs qui sont plus ou moins attirantes, des couvertures qui résistent mieux à un chat qui se détartre les dents dessus. Et après, il y a les tests liquides. On pourrait croire que tous les livres sont égaux face à l’urine de félins, mais certains ont les pages qui collent plus, ou l’encre qui s’efface. D’autres ont les pages déjà jaunies de base et s’en tirent presque sans égratignure. À part l’odeur, pour laquelle on ne peut pas faire grand chose. »

Malheureusement, avec la multiplication du nombre de sorties et la diminution des ventes par titre, de plus en plus d’éditeurs rechignent à avancer l’argent pour s’assurer que leur livre passe les tests les plus poussés.

« Vous savez, l’image du type qui se fait tirer dessus et s’en sort parce qu’il avait une bible dans la poche ? Bon, déjà, la plupart des livres que j’ai eu l’occcasion de tester ne permettent pas d’arrêter un calibre comme le 9mm, même s’il y a des exceptions. Mais maintenant, les éditeurs ne s’embêtent même plus à vérifier ce genre de choses, au détriment de la sécurité de leurs lecteurs. »

La sécurité, c’est ce qui l’a poussée à quitter son ancien métier. Avant, Lizzie testait la sécurité des voitures, mais elle a eu des problèmes pendant la loi travail après l’incendie du véhicule d’un ouvrier au SMIC qui avait travaillé toute sa vie pour se payer une Porsche.

« Je trouve abusé qu’on dise que c’était de ma faute. Je n’ai fait que jeter un cocktail Molotov, pour tester. Je n’y suis pour rien si les flammes ont aussi bien pris. En vérité, ce type aurait dû me remercier de lui avoir montré que sa voiture était aussi peu ignifugée. »

Interrogée sur ce qu’elle pense des réactions hostiles à sa profession qui détruit des livres, Lizzie balaye les critiques d’un revers de la la main.

« Je ne comprends pas ces reproches. Pour moi aussi, le livre est sacré, une fois que je l’ai sacrifié. C’est la putain d’étymologie. »

À méditer…

Sur les pas de Colonel Hipster, notre super-héros national

, 12:22

Si l’affaire qui fait grand bruit en ce moment est celle d’Alexandre Benalla et ses attributions obscures, nous avons, pour notre part, décidé de suivre une journée dans les pas d’un autre homme de l’ombre de l’Élysée, Colonel Hipster.

Hormis des rôles de protection du Président de la République lors de ces déplacements, rien à voir cependant entre les deux hommes : là où Alexandre Benalla a soulevé les critiques de l’opposition comme de syndicats de police, Colonel Hipster ne suscite qu’éloges et approbations, depuis les rangs de la majorité jusqu’à Jean-Luc Mélenchon, en passant par José Bové.

Souvent comparé à son « homologue » outre-atlantique Captain America, Colonel Hipster assure pourtant avoir très peu en commun avec cet individu.

« Captain America, c’est la malbouffe et les produits transgéniques pour devenir plus fort. Moi, je ne dois mes pouvoirs qu’à une alimentation saine et à de l’exercice régulier. Par exemple, je ne me déplace qu’en vélo, cela me permet ainsi de réduire mon empreinte carbone. »

Humble, Colonel Hipster préfère ne pas détailler l’étendue de ses super-pouvoirs. Interrogé sur les rumeurs qui voudraient que sa barbe soit en adamantium et lui permette d’esquiver les balles, il rigole d’abord, avant de répondre :

« J’entretiens ma barbe avec une huile dont la recette m’a été confiée par mon arrière grand-père. Je peux vous assurer qu’il n’y a que des produits végétaux issus de l’agriculture biologique. Pas de saleté de métal composite ! »

Au cours de notre journée à le suivre, nous n’avons pas pu assister aux pouvoirs de cette mythique barbe, mais nous avons pu constater l’efficacité de Colonel Hipster. Ainsi, alors qu’un dangereux individu tout de noir vêtu s’engage dans l’Élysée, un pistolet à la main, Colonel Hipster est bien évidemment le premier à bondir et à se mettre sur son chemin.

Le dangereux malfrat pointe alors son pistolet sur notre super-héros national et appuie sur la détente, mais heureusement, l’arme s’enraye, comme désarmée face à la force tranquille de son adversaire.

« C’est ce qui arrive quand on utilise un pistolet discount, probablement fabriqué dans les pays de l’est !, nous explique Colonel Hipster. C’est pourquoi j’ai, de mon côté, fait faire revolver sur mesure par un artisan local. Quand aux balles, je les façonne moi-même avec de la poudre bio. »

Alors qu’un homme de la GSPR (Groupe de Sécurité de la Présidence de la République) lui tend un serre-flex pour menotter l’individu, Colonel Hipster refuse et préfère utiliser de la corde en chanvre tressé.

« Les serre-flex, ce n’est pas bio-dégradable, alors que la corde on peut la réutiliser, et quand on connaît les bons nœuds de marins, on ne s’en dégage pas facilement. »

Si les missions de Colonel Hipster sont avant tout la protection du Président de la République et la défense des intérêts nationaux, il mouille parfois aussi la chemise pour des tâches moins stratégiques.

« L’autre jour, nous explique-t-il, le chat de ma voisine était bloqué sur un arbre. Je l’ai donc fait descendre en coupant l’arbre (grâce à la hache que m’a fabriquée un ami forgeron) et le tour était joué ! J’ai également découpé l’arbre en planches et ai pu me fabriquer un très joli meuble. »

Les interventions de Colonel Hipster sont pratiquement toujours saluées unanimement. Nous avons tout de même réussi à trouver quelques trouble-fêtes pour critiquer les agissement de notre fleuron national :

« Écoutez, mon chat il allait redescendre. Et l’arbre je l’aimais bien, il me faisait de l’ombre en été. Alors d’accord Colonel Hipster m’en a planté un nouveau mais le temps qu’il me fasse de l’ombre je ne serai plus là. », témoigne ainsi Gisèle, 83 ans.

C’est pourtant l’une des rares paroles que nous trouverons pour critiquer le super-héros. Même certains des individus à qui il a dû s’opposer vouent une certaine admiration pour l’homme :

« J’ai rencontré Colonel Hipster alors que j’avais un cocktail Molotov dans la main, témoigne ainsi Stéphane, ancien Black Bloc. Il s’est planté devant moi sans avoir peur et m’a signalé que l’essence que contenait la bouteille contenait des hydrocarbures nocifs pour la planète, et que je prétendais lutter contre le capitalisme alors que je portais un tee-shirt fabriqué dans une usine en Chine. J’ai réalisé mon erreur grâce à lui, il m’a remis sur le droit chemin. »

Depuis, Stéphane a monté un salon de dégustations de yahourts bio. Malheureusement, toutes les situations ne peuvent pas être résolues de manière aussi non-violentes.

« Bien sûr, Colonel Hipster fait parfois usage de la force, admet Marie-France Monéger-Guyomarc’h, directrice de l’Inpection Générale de la Police Nationale (IGPN), mais toujours de la violence légitime avec des gestes techniques parfaitement maîtrisés. »

Pour illustrer son propos, elle nous montre une vidéo, où l’on voit Colonel Hipster donner un coup de pied dans la tête d’un manifestant à terre.

« Regardez ce coup de pied, admire la directrice de l’IGPN, il est absolument parfait, effectué dans les règles de l’art, il n’y a rien à reprocher. »

De son côté, Colonel Hipster n’a pas honte d’avoir parfois recours à la violence, mais il n’en est pas non plus excessivement fier. Ce qu’il préfère noter dans la vidéo, c’est que sa botte est en cuir véritable et a été réalisée par un petit cordonnier.

Tromperies sur la marchandise, une nouvelle de fantasy urbaine avec des sorcières, maintenant publiée sous licence libre

, 20:13

Tromperies sur la marchandise, jusqu’ici uniquement disponible pour les abonné·e·s Tipeee, est maintenant publiée sous licence libre (Creative Commons By-ShareAlike). Vous pouvez donc maintenant la télécharger librement sur cette page (ou ci-dessous).

Tromperies sur la marchandise - nouvelle de fantasy urbaineEn cette nuit de solstice d’hiver, le conseil des Sages de la Sororité de Sorcellerie se réunit et doit trancher sur une question inhabituelle : Vénus, qui vient de leur apprendre qu’elle est transsexuelle, peut-être continuer à rester une sorcière ?

Une nouvelle où le surnaturel se mêle aux thématiques transgenres, et où les apparences sont parfois trompeuses…

Tromperies sur la marchandise est une nouvelle dont j’avais publié une première version sur mon blog il y a quelques années, et qui a été largement remaniée en 2016. Elle se déroule dans le même univers (que j’ai maintenant décidé d’appeler le « butchiverse ») qu’Une autobiographie transsexuelle (avec des vampires) — où le personnage principal de Vénus était déjà mentionné, à défaut d’apparaître réellement dans l’histoire — et La chair & le sang.. Le thème de cette nouvelle préfigurait d’ailleurs déjà un peu certains sujets traités dans Une autobiographie transsexuelle (avec des vampires).

Ce texte est disponible aux formats HTML, EPUB et PDF, et les fichiers sources (au format Markdown) sont sur mon dépôt Github. Une version papier au format fanzine peut également être commandée dans la boutique.


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Billets connexes

Texte de novembre pour les abonné·e·s Tipeee : Le mauvais genre des anges

, 14:06

Le premier texte pour les abonné·e·s Tipeee est maintenant disponible ! Il s'agit d'une nouvelle, Le mauvais genre des anges.

Le mauvais genre des anges

En fait de « nouvelle », elle est déjà plutôt ancienne, puisque je l'ai écrite en 2008 (tout cela ne nous rajeunit pas). Elle avait été publiée à l'époque dans le numéro trois du fanzine Piments & Muscades. Jusqu'ici, elle n'avait pas été diffusé en version numérique.

Il s’agit d’un texte censément « érotique », mais qui, comme bien souvent lorsque je me suis essayée à l’écriture de tels textes, comporte plus de scènes de flingues que de passage vraiment « charnels ».

Dans cette nouvelle, on suit Gabrielle, une ange en treillis habituée à éliminer des démons. Elle est cependant un peu décontenancée lorsqu’elle en rencontre un qui sort de l’ordinaire.

Lire cette nouvelle

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Pour ce qui est de la version papier, je ferai une annonce plus détaillée dans les prochains jours et les impressions et envois dans les semaines à venir. Pour l'instant tout ça est encore un peu en période de rodage, donc je m'excuse pour les délais ^^

Je tiens à remercier toutes les personnes qui me soutiennent sur Tipeee (ou en général). Je ne fais pas forcément de remerciements individuels pour chaque abonné·e, ce n'est pas par ingratitude mais plus parce qu'en terme d'étiquette sociale je trouverai ça un peu bizarre ^^, Je n'ai pas encore de quoi me payer une Harley mais ça me permet déjà d'envisager une plus grande indépendance vis à vis des systèmes comme Amazon et c'est déjà chouette. Merci à tou·te·s :)

Blonde à forte capacité pulmonaire

, 22:44

Pour fêter la 189ème vente[1] de Pas tout à fait des hommes, j'ai décidé de republier ici une nouvelle qui se situe dans le même univers, et où l'on retrouve l'héroïne, Kalia.

pulmonaire.png

Kalia est une elfe blonde à forte capacité pulmonaire.

Blonde, c’est indiscutable. Même si ses longs cheveux ne sont pas, en ce moment, très propres, ils en sont pour le moins jaune pâle ; il n’y a donc pas de doute à ce sujet.

Elfe, cela se voit moins. En fait, la seule chose qui permet de dire que Kalia en est une, ce sont ses oreilles pointues, mais elles sont en général cachées par les cheveux mentionnés précédemment. Elle n’est ni grande, ni mince, comme le sont la majorité de ses congénères ; à vrai dire, elle est plutôt petite et elle a pris quelques kilos dernièrement. En ce qui concerne l'éblouissante beauté elfique, tout est dans l’œil de l’observateur, mais il faut reconnaître que la plupart des observateurs ne semblent pas si éblouis que ça.

Quant à sa capacité pulmonaire, même si sa poitrine est significativement moins volumineuse que la moyenne des femmes adultes, elle est plutôt forte, puisque Kalia entame sa troisième minute sous l’eau et qu’elle n’a pas encore perdu connaissance.

Si elle se trouve actuellement sur le fond vaseux de la Malsaine, le fleuve qui traverse la ville de Nonry et qui mérite particulièrement son nom en aval de celle-ci, ce n’est pas parce qu’elle a envie de batifoler dans l’eau. La raison à sa présence ici, c’est qu’elle a été jetée d’un pont, pieds et poings liés, attachée à une solide barre en fonte ; et c’est, indirectement, parce qu’un homme bien habillé est venu frapper à la porte de son appartement il y a deux jours.


Blonde à forte capacité pulmonaire est une nouvelle de fantasy. Vous pouvez la télécharger gratuitement :

Blonde à forte capacité pulmonaire a été initialement publiée dans le second numéro de Solstice, Crimes en imaginaire, publié en 2008 par les éditions Mille Saisons. À ma connaissance, cette anthologie n'est plus disponible sur le site de l'éditeur, mais il doit toujours être possible d'en trouver des exemplaires si vous vous débrouillez bien.

Le personnage central de Kalia est par ailleurs également l'héroïne du roman Pas tout à fait des hommes ; chronologiquement, celui-ci se déroule avant cette nouvelle. Deux autres nouvelles se situent dans le même univers (mais ne partagent pas les mêmes personnages) : Une mine de déterrés et Sortir du cercueil. Vous pouvez les retrouver toutes les deux (ainsi que deux autres nouvelles) dans le recueil Sorcières & Zombies.


Vous aurez pu faire le calcul vous-même, ce texte a été écrit il y a sept ans. Il y aurait peut-être des choses que je ne ferais pas de la même façon maintenant, comme, hum, le titre. Le but était de jouer sur la contradiction entre celui-ci et le contenu du texte, et de jouer sur le cliché qu'on peut parfois voir dans la fantasy (et ailleurs) avec des meufs qui sont réduites à des plantes vertes avec des gros seins. Sauf qu'au final je ne sais pas si le résultat permet vraiment une critique de ça, ou joue juste sur le côté racoleur. J'aurais pu le changer, évidemment, mais outre que c'est pénible de trouver un nouveau titre, ça a été publié comme ça. Il n'en reste pas moins que c'est une nouvelle que j'aime bien et que j'avais envie de partager à nouveau pour les gens qui n'auraient pas acheté cette anthologie à l'époque.

Note

[1] J'avais prévu d'attendre la 200ème, et puis je me suis dit que, merde, les chiffres ronds, c'est tellement convenu. On pourrait aussi me dire qu'il n'y a pas de quoi pavoiser d'avoir vendu 189 exemplaires, toutes versions confondues (papier et numérique) en à peu près cinq ans, mais pour un livre surtout disponible en téléchargement gratuit — et sous licence libre — je trouve que ce n'est, tout bien considéré, pas si honteux.

Nouvelle : La mémoire de l'eau

, 16:42

La mémoire de l'eau est une nouvelle que j'avais écrite il y a des années de cela, et que je n'avais pas remis à disposition sur ce site pour des raisons obscures[1], mais la voici donc.

Il s'agit d'une enquête, où Karine Réveaux, policière dans un petit village, se retrouve à devoir faire équipe avec Ana Delame, une voyante/guérisseuse/homéopathe/magnétiseuse. Je ne sais pas si c'est à proprement parler du fantastique, aussi je vous laisserai vous faire votre opinion sur le sujet.

Le texte complet est disponible :

Notes

[1] J'avais zappé, quoi.

Rock'n troll

, 21:58

Voilà une très courte nouvelle, pas forcément transcendante, qui est sans doute inspirée des discussions enflammées (pour ne pas dire des flamewars) sur les réseaux sociaux et des proportions que ça peut prendre, mais qui vient surtout du fait que je réalisais qu'il y avait un genre que je n'avais abordé dans mes écrits, et qui pourrait peut-être être rigolo. Ou pas. Je ne sais pas si je développerai cet aspect-là, mais en attendant, voilà le petit texte en question.

Comme d'habitude, vous pouvez le lire en-dessous, ou alors récupérer le texte au format :

(Ouais, vu la taille du texte, c'était peut-être pas indispensable...)

Thomas décapsula sa canette de bière et fit craquer ses doigts. Il s'apprêtait à passer à l'attaque. Pas physiquement, non, puisqu'il était seul dans son appartement, situé au septième étage d'un immeuble du centre ville. Thomas s'apprêtait à passer à l'attaque depuis son canapé.

Thomas était un troll. Pas la créature mythologique à la taille imposante : si Thomas n'était pas particulièrement petit, il n'était pas non plus très grand, et n'avait guère la carrure d'une armoire à glace. Thomas se contentait de sévir sur Internet, et particulièrement sur les réseaux sociaux qu'il affectionnait beaucoup ces derniers temps. Il était spécialisé dans l'attaque contre les féministes et les minorités déviantes, qu'il se faisait plaisir à insulter et à harceler. Il trouvait ensuite jubilatoire de voir les réactions outrées de ces salopes hystériques lorsqu'il se moquait d'elles.

Ce soir, il avait décidé de passer un cran au-dessus. Il avait repéré le site d'une de ces connasses, fouillé de fond en comble pour y trouver tout ce qu'il pouvait, et réussi à dégotter quelques informations compromettantes dont il savait pertinemment qu'elles feraient mal à Femigrrrl. Par exemple, révéler qu'elle s'appelait en réalité Sylvie Lefèvre, ou encore son adresse. Voilà qui la ferait flipper.

Lorsqu'il posta les informations qu'il avait réussies, par ses compétences techniques, à se procurer, la réaction de l'intéressée ne se fit pas attendre.

Tu sais quoi, trouduc ? Ce genre de choses pourrait te coûter cher.

Thomas eut un grand sourire devant la menace. Comme si elle allait porter plainte, c'était tellement crédible. Et évidemment, vu que lui faisait attention à ne poster que sous pseudonyme et à ne rien révéler de sa vraie vie, il ne craignait pas grand chose.

Thomas prit le temps d'avaler une gorgée de bière en réfléchissant à une réplique cinglante.

Tu me fais trop peur, Sylvie. Je me fais pipi dessus. Tu vas appeler ton petit copain Pierre ?

Thomas avait en effet réussi, en cherchant bien, à trouver des mails privés qui n'auraient jamais dû se trouver sur un serveur public. Quelle couillonne, cette fille. Elle l'avait cherché aussi. Ça lui apprendrait peut-être à se servir d'Internet.

Il y eut rapidement un réponse de Femigrrrl.

Tu devrais arrêter tes conneries MAINTENANT et présenter des excuses. Ou alors tu auras des soucis. Dernier avertissement.

Thomas se mit à rire, seul devant son ordinateur. Elle s'imaginait vraiment lui faire peur ?

Oh, je suis mort de trouille. LOL.

Il sirota ensuite une autre gorgée de bière, attendant la réponse de l'hystérique débile.

Déguste bien ta Heineken et réfléchis à ce que je dis. DERNIÈRE CHANCE.

Thomas faillit recracher sa gorgée et regarda sa canette, qui était effectivement une Heineken. Comment est-ce qu'elle savait ? Par hasard, peut-être ? Des tas de gens buvaient de la Heineken, non ?

Oh, tu as failli en foutre partout. Ça aurait été dommage de tacher ton beau canapé en cuir.

Thomas soupira. La webcam. Cette connasse avait dû pirater son ordinateur. Il devait admettre qu'il l'avait sous-estimée. Cela dit, ça ne l'inquiétait pas plus que ça. Au pire, elle allait lui faire quoi, lui effacer ses fichiers ? La belle affaire, il avait des sauvegardes sur son autre ordinateur. Il commença par cacher la caméra avec son doigt, puis tapa maladroitement de l'autre main :

OMG une script-kiddie. Tu sais te servir d'un programme de P1RATE, LOL. J'ai trop peur.

Il regardait les étagères devant lui à la recherche d'un rouleau de scotch. Il n'allait pas pouvoir rester éternellement le doigt sur sa caméra.

Derrière lui, il entendit deux vibrations et se retourna, surpris. Il fit un bond en arrière lorsqu'il aperçut la femme qui était en train de consulter son portable.

Elle était plutôt grande, mais pour le reste, c'était dur de voir à quoi elle ressemblait, car elle avait une cagoule violette sur la tête. Elle portait également une combinaison noire avec des lignes violettes, des docs violettes, et une cape violette et noire.

Elle tenait un téléphone d'une main, et une batte de base-ball de l'autre, qui reposait sur son épaule.

« Je ne suis pas une script-kiddie, répondit-elle, amusée. Je suis Captain Feminist. »

Thomas resta un moment bouche bée, la peur se mêlant à l'incompréhension.

« Quoi ? finit-il par réussir à dire.

— Le nom n'est pas forcément définitif », admit Captain Feminist.

Elle lui envoya alors un coup de batte en plein dans la jambe, sans qu'il n'ait pu s'y attendre. Tout au plus avait-il eu le temps de la décaler légèrement, sauvant temporairement son genou.

« Par contre, reprit la super-héroïne, je pense vraiment que je vais garder la batte. »

Sortie du recueil Sorcières & Zombies

, 00:37

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Sorcières & Zombies est un recueil de nouvelles mêlant fantastique et fantasy, humour et horreur, vampirisme et homosexualité, morts-vivants et enquête, transsexualité et sorcellerie.

Ce recueil contient quatre textes : "Route de nuit" et "Créatures de rêve" (fantastique) revisitent les clichés de l'horreur en jonglant entre cauchemar et réalité, tandis que "Sortir du cercueil" (fantasy) s'attaque aux vampires et que "Une mine de déterrés" mélange surnaturel et enquête policière.

Ce livre peut être commandé en version papier sur Lulu.com pour le prix de 10€, et est également disponible au format numérique sur Amazon pour un peu moins d'1€.

Les trois premiers textes, Route de nuit, Créatures de rêve et Sortir du cercueil ont déjà été publiés précédemment sur ce site, et peuvent toujours être téléchargés gratuitement.

La dernière nouvelle, Une mine de déterrés est un texte inédit de fantasy où deux détectives privés, Anya et Ray, enquêtent à la demande d'un syndicat de travailleurs sur une mystérieuse explosion survenue quelques temps plus tôt dans une mine.

Nouvelle : Une leçon d'humanité

, 19:18

Pour bien entamer ma bonne résolution de poster plus souvent des articles sur ce site, voilà une petite nouvelle de Science-Fiction.

À la base, le but de ce texte était de me familiariser un peu avec les personnages et l'univers que j'avais en tête, histoire de voir si c'était envisageable de faire quelque chose de plus long, donc ce n'est pas très clair s'il s'agit d'une nouvelle ou d'un début de roman, aussi je vous prie de bien vouloir excuser s'il y a un aspect «auto-suffisant» moins présent que pour une «vraie» nouvelle. Je n'ai rien prévu de tel pour l'instant, mais une suite finira peut-être par voir le jour, sait-on jamais.

En attendant, vous pouvez déjà lire ce petit texte :

  • en version PDF ;
  • en version ePub ;
  • en version HTML ;
  • et, si vous voulez me briser le cœur alors que je me donne du mal à essayer de faire une mise en page potable sous plusieurs formats, simplement lire ci-dessous la version «copiée/collée».

Ada parcourait les longs couloirs vitrés de la base lunaire à la recherche d'un café. D'un point de vue technique, ce n'était en fait pas à strictement parler une base lunaire, étant donné que la planète en question s'appelait Nifhleim et était la seconde lune de Midgard ; cependant, depuis que les colons humains avaient quitté la Première Terre devenue inhabitable, des siècles plus tôt, tout le monde appelait Midgard la nouvelle Terre — ou plus simplement la Terre tout court — et Nifhleim la nouvelle Lune. Ada se demandait si le fait que les nouveaux noms n'avaient pas pris étaient liés au choix de la mythologie Viking pour les nommer, ou si les humains avaient simplement eu besoin d'utiliser des noms familiers après leur exode.

La nouvelle Terre et sa seconde Lune — la première, Asgard, était plus grosse mais plus diffile à terraformer, pour des raisons techniques qui échappaient à Ada — n'étaient pas les seuls endroits de l'espace à avoir été colonisés, mais c'était ceux qui étaient relativement peuplés. Il y avait quelques stations spatiales qui se promenaient dans le nouveau système solaire et quelques bases sur d'autres planètes, mais seule la nouvelle Terre avait été entièrement terraformée. Concernant sa Lune, le processus était encore en cours et l'atmosphère n'était toujours pas respirable, mais un ensemble de dômes et de bases connectés par des tunnels s'étendaient sur des villes entières.

Pour l'heure, Ada marchait le long d'un de ces tunnels vitrés qui reliaient les dômes entre eux. Si le paysage était magnifique, elle se sentait toujours mal à l'aise en voyant que seuls quelques centimètres de verre la séparait d'une mort certaine. Elle avait beau savoir que les vitres étaient solides et résistaient à de fortes pressions ou même à des impacts de balle — à moins d'avoir un très gros calibre — et qu'il y avait des volets de secours prêts à se fermer en quelques secondes, cela n'apaisait pas ses angoisses.

Ada marchait donc d'un pas rapide sans admirer ni la fin du coucher de soleil sur les collines rouges, ni la Nouvelle Terre qui était déjà haut dans le ciel. Elle cherchait simplement le café « Chez Francis » où elle pourrait boire un coup et, si elle avait de la chance, trouver un emploi ponctuel.

Ada était une femme d'une trentaine d'années, plutôt grande et mince. Elle avait de longs cheveux noirs qu'elle avait attachés. Elle portait un pantalon kaki et une veste synthétique noire avec des bottes d'origine militaire. Elle espérait que ses vêtements plutôt masculins pourraient convaincre un employeur qu'elle pouvait faire un des nombreaux travaux physiques d'ordinaire plutôt réservés aux hommes.

Après un quart d'heure de déambulation dans de longs couloirs qui se ressemblaient tous, malgré les quelques tentatives de décoration, elle finit par trouver le bar qu'elle cherchait. Il s'agissait à l'origine d'un ancien module spatial, qui avait depuis des années été rattaché au milieu d'un tunnel connectant deux dômes entre eux. Le bar en lui-même occupait une pièce plutôt large, et était pour l'heure pratiquement rempli. Comme elle s'y attendait, il y avait peu de femmes : elle n'en voyait que deux, une grande blonde en mini-jupe accoudée au comptoir devant un petit verre, et une serveuse.

Ada inspira, se dirigea vers le bar et commanda une bière en se demandant ce qu'elle allait bien pouvoir faire ensuite. On lui avait dit que cet endroit était un bon plan pour trouver un travail au noir, mais elle ne voyait pas trop à qui s'adresser : à la serveuse ? Au patron, qui lisait son journal ? À un de ces groupes d'hommes assis à une table ?

Ce fut la grande blonde qui lui parla, après l'avoir regardée de haut en bas puis de bas en haut.

« Ça va, fit-elle en guise d'introduction. Je suis plus grande que toi. J'ai cru que j'allais devoir faire la gueule à la seule meuf qui venait picoler, ça aurait été un peu con. »

Ada lui jeta un coup d'œil rapide. Elle était effectivement de quelques centimètres plus grande qu'elle, même si cela venait peut-être en partie des bottes à talon. Elle avait une mini-jupe noire, un haut avec un decolleté vertigineux, des cheveux longs parfaitement lissés et portait sur son épaule un grand sac à main de luxe. Ada dut lutter contre son éducation misogyne pour ne pas la classer dans la catégorie « pouffiasse décérébrée ».

« J'en suis ravie », fit Ada en retirant sa veste. Il faisait beaucoup plus chaud à l'intérieur du bar que dans les couloirs lunaires.

La blonde fixa l'épaule gauche d'Ada pendant un moment. En effet, maintenant que celle-ci était en débardeur, le tatouage représentant une hache à deux têtes était parfaitement visible.

« C'est un labrys ? » demanda la blonde.

Ada fut étonnée qu'elle sache de quoi il s'agissait. Le labrys en question était un symbole lesbien plutôt obscur, et elle n'aurait pas spontanément rangé son interlocutrice parmi cette population.

« Tu sais ce que c'est ? demanda-t-elle.

— Bien sûr que je sais ce que c'est, répliqua la blonde sur un ton hautain. Évidemment, moi, je n'ai pas besoin d'un tatouage comme ça.

— Qu'est-ce que tu veux dire ?

— Viens prendre un verre avec moi, fit la blonde avec un sourire enjôleur, et tu sauras ce que ça veut dire. »

Ada était un peu déconcertée, et elle n'était pas venue pour ça, mais décida que, après tout, pourquoi pas ?

« Je m'appelle Ada, fit-elle.

— Némy. Si tu m'offres un autre verre de whisky, on peut se poser à la petite table, là-bas. »

Ada sourit et commanda un verre de whisky à la serveuse, avant de s'installer avec la blonde à l'emplacement que celle-ci lui avait montré, situé dans un coin de la pièce.

« Je dois dire que je ne m'attendais pas à ça, lança-t-elle en tendant le verre.

— Je fais souvent des choses inattendues, répliqua Némy en fouillant dans son sac à main. C'est ma signature. »

Ada hocha la tête, ne voyant pas trop quoi dire.

« Évidemment, poursuivit la blonde en sortant une cigarette, une fois qu'on me connaît, on s'attend à ce que je fasse des choses inattendues, alors j'imagine que ça l'est moins. Inattendu, je veux dire.

— Je ne crois pas qu'on ait le droit de fumer ici », intervint Ada.

Némy avait déjà la cigarette dans sa bouche et avait sorti un briquet. Elle fit une grimace de dépit, et la rangea à contrecœur.

« Ouais, évidemment. Air recyclé, générateur d'oxygène, pas le droit de fumer. Chiotte. Heureusement que j'ai trouvé quelqu'un pour me payer à boire. »

Sur ce, elle vida son verre de whisky et le reposa violemment sur la table.

« Alors, Ada, dis-moi, si ce n'est pas indiscret, qu'est-ce que tu es venue faire ici ?

— Boire un coup. J'espérais peut-être trouver un travail, éventuellement. Et toi ?

— Pareil. À part boire, je suis là pour le boulot. Boulot rapide et bien payé, tout ce que j'aime, si tu vois ce que je veux dire ?

— Pas vraiment », répondit Ada.

Némy suivait du regard un homme d'une cinquantaine d'année, mieux habillé que les autres, qui se dirigeait vers les toilettes.

« Je reviens tout de suite, fit-elle. Je dois faire pipi. »

Ada regarda la blonde se précipiter vers les toilettes à la suite de l'homme. Elle était quelque peu perplexe : qui était exactement Némy ? À quoi jouait-elle avec elle ?

Elle n'eut pas le temps de se poser beaucoup plus de questions, car un colosse d'une trentaine d'années avec une cicatrice imposante sur le visage venait de s'assoir sur la chaise laissée vacante par Némy.

« Salut, beauté », commença-t-il avec un sourire qu'Ada n'apprécia pas vraiment.

Il approcha sa main du visage de la jeune femme, qui eut un mouvement de recul.

« Qu'est-ce qu'il y a, poupée ? » demanda-t-il en approchant un peu trop sa tête. Ada pouvait sentir son haleine alcoolisée et sentit son cœur s'accélérer. La situation risquait de mal tourner. « Tu préfères les putes blondes, c'est ça ? »

Elle ne trouva rien à répondre, tandis que l'homme caressait son visage. Si elle réagissait, elle craignait que cela ne dégénère, mais cela risquait aussi d'arriver si elle ne réagissait pas.

« T'es plutôt canon, mignonne, continua l'innoportun.

— C'est gentil, répondit Ada, mais je ne suis pas intéressée par...

— Laisse-moi finir, salope, répliqua l'homme en haussant la voix. T'es plutôt canon, mais c'est dommage que tu ne sois pas une vraie femme. »

Il avait dit les derniers mots plus forts, et cracha ensuite par terre pour marquer son propos. Aux tables voisines, des gens se détournèrent de leurs conversations pour voir ce qui se passait.

« Je vous demande pardon ? » demanda Ada aussi calmement qu'elle le pouvait.

Elle sentait la panique monter. Avait-il vraiment deviné ? Comment avait-il pu deviner ? Elle avait fait tout ce qu'elle pouvait pour passe aussi inaperçue que possible, est-ce que cela se voyait encore tant que ça ?

« Tu n'es pas une vraie femme, répéta l'homme en pointant un index accusateur vers elle. Tu es une putain de machine. »

Il y eut des « oh » et des « ah » dans toutes les tables avoisinantes, accompagnés de « ce n'est pas possible » ou de « je ne l'aurais pas cru ». Ada se sentait maintenant le centre d'attention de toute la pièce.

« C'est ridicule, protesta-t-elle. Je suis une femme, humaine, biologique.

— Tu es une putain de machine ! protesta l'homme. Tu crois que je ne sais pas faire la différence ?

— Je pense que vous faites erreur », fit une voix calme venant de derrière lui.

C'était Némy, qu'Ada n'avait pas vue revenir des toilettes. Elle se tenait debout, fixant celui qui s'était assis sur sa chaise d'un air accusateur.

« Cette femme n'est évidemment pas une machine, expliqua-t-elle. Elle m'a payé un coup à boire. Les machines ne me payent pas de coup à boire. Ce n'est pas faute d'essayer, notez. Demandez à la moitié des distributeurs automatiques de boissons de l'univers, ils vous le diront, ils ne m'ont jamais payé un coup. »

L'homme leva les yeux vers elle, semblant quelque peu surpris par l'argument.

« D'accord, admit Némy, techniquement, des distributeurs m'ont déjà payé des coups, mais c'est uniquement parce que je maîtrise assez bien la façon de secouer le bouzin pour que ça tombe sans mettre de crédit.

— T'es conne ou quoi ? protesta l'homme qui avait pris la chaise de Némy. Cette fille est un putain de cyborg.

— Oui, je suis conne, fit Némy avec un large sourire. Regarde mes cheveux. Je suis tellement blonde. Je n'avais pas compris ce que tu voulais dire, et je n'étais pas du tout en train de te donner une porte de sortie avec humour pour que tout se passe bien. Au fait, c'est ma chaise, sur laquelle tu es assis. »

L'homme se leva brusquement, mais ce n'était pas pour rendre la chaise ; au lieu de cela, il se dressa en face de Némy, qu'il dépassait d'une dizaine de centimètres, et la regarda d'un air menaçant en collant son visage à quelques centimètres de celui de la jeune femme.

« Tu cherches les embrouilles, poupée ?

— Oh, fit Némy, poupée, maintenant ? Tu sais quoi, je me sens de plus en plus blonde. Je crois que je blondis à vue d'œil. Je pense que tu ferais mieux de t'excuser auprès de mon amie et de nous laisser tranquille avant que je ne fasse quelque chose de très, très blond.

— Euh, Némy ? » fit Ada, qui craignait que sa nouvelle amie se ne mette dans le pétrin à cause d'elle.

Celle-ci lui fit, de la main signe de se taire.

« Némy, c'est mon diminutif. Dans les situations conflictuelles comme celle-ci, je préfère Némésis. »

Elle se tourna à nouveau vers l'homme, qui la regardait toujours d'un air menaçant mais restait un peu hébété, peu habitué à ce qu'une « poupée » en mini-jupe lui réponde de cette façon.

« Je sais, c'est un nom un peu pompeux, admit-elle, mais je l'aime bien. Alors, aurais-tu la décence de t'excuser auprès de mon amie ?

— M'excuser ? s'emporta l'homme. Auprès d'une saloperie de machine qui se fait passer pour une nana ? Pas question. Peut-être que tu coucherais avec un robot, mais pas moi. Dégage, salope. »

Némy arbora un nouveau sourire, plus carnassier que les précédents.

« Je rêvais que tu dises ça. »

Elle envoya un violent coup de poing dans le nez de l'homme, le lui fracassant. Alors que par réflexe les mains de celui-ci commençaient à se porter vers son visage, elle planta un de ses talons dans le genou gauche de son adversaire, puis passa derrière lui, attrapa sa tête et l'envoya cogner violemment la petite table, explosant son verre vide au passage.

Tandis que l'homme s'écroulait par terre, elle se tourna vers le reste de l'audience, qui était pour l'instant encore stupéfaite, et fit un petit sourire.

« Désolée, s'excusa-t-elle. Je l'avais prévenu, que je pouvais réagir de façon assez blonde. »

Il y eut une agitation dans toute la salle. Certains se contentaient de regarder le spectacle, heureux qu'il se soit passé quelque chose d'intéressant ce jour-là, mais beaucoup ne semblaient pas apprécier qu'une cinglée démolisse un habitué du lieu pour protéger une cyborg.

Ada était paniquée, craignant de se faire lyncher, mais Némy sembla se contenter d'estimer qu'après ça, elle ne risquait pas de se faire beaucoup plus engueuler si elle allumait une cigarette et ressortit de son sac celle qu'elle avait rangée quelques minutes plus tôt.

« Mon Dieu, fit Ada en se levant, je t'ai mise dans le pétrin.

— Pas ta faute, répliqua Némy. Si toi t'es une cyborg, moi je suis une putain de vampire. Je ne ferais pas ça si j'étais toi. »

La dernière phrase s'adressait à un homme qui avait esquissé un mouvement vers le revolver qui était accroché à sa ceinture, et Némy avait appuyé son propos en sortant d'un geste rapide un fusil à canon scié de son sac à main. Maintenant, Ada comprenait pourquoi celui-ci était si volumineux.

« Maintenant, les amis, nous allons vous laisser. J'apprécierais qu'aucun d'entre vous ne tente quoi que ce soit.

— Tu es dans la merde à cause de moi, fit Ada tandis que Némy essayait de se diriger vers la sortie à reculons.

— Ce n'est pas à cause de toi, ne t'en fais pas. »

C'est le moment que choisit un homme pour sortir des toilettes, paniqué.

« Nom de Dieu ! s'exclama-t-il. Il y a un cadavre dans les chiottes !

— Tué avec un lacet étrangleur ? demanda Némy. Deux doigt découpés par ledit lacet parce ce qu'il a essayé de résister ? Ça doit être le mien, alors. »

Elle fit un petit sourire à Ada.

« Tu vois ? Ce n'est pas à cause de toi. »

Les deux femmes étaient presque sorties du bar et atteignaient le couloir vitré. Némy braquait toujours son fusil vers les gens qui semblaient les plus menaçants, mais cela n'avait pas empêché une dizaine d'entre eux de sortir des pistolets divers.

« Vous êtes coincées ! fit un des hommes. Vous n'irez nulle part ! »

Comme pour le contredire, un vaisseau spatial apparut à quelques mètres des vitres. Il volait trop bas, songea Ada. Un engin de cette taille n'aurait pas dû se maintenir aussi près du sol, c'était trop risqué.

Némy tira Ada hors du bar, dont le sas commençait à se refermer. Le patron avait réagi rapidement en voyant un vaisseau s'approcher trop près.

Celui-ci commença à tirer sur les vitres, qui se fendirent rapidement. Ada eut le temps de se dire qu'elle le savait bien, que la solidité de ce verre n'était pas aussi rassurante qu'on le pensait. Puis elle jeta un coup d'œil au vaisseau, qui avait l'air d'un vieux transporteur de marchandises à moitié pourri. Sauf que les vieux transporteurs de marchandises à moitié pourris n'avaient pas de mitrailleuses et ne pouvaient pas se permettre d'être en vol stationnaire à cette altitude.

Elle lut alors le nom de l'engin, inscrit sur la coque : « Labrys ». Elle regarda Némy, interloquée.

« Je te l'avais dit, fit celle-ci, que je n'avais pas besoin d'en avoir un de tatoué.

— Ouais, soupira Ada. Tu es plus grande que moi, tu as le plus gros labrys, félicitations.

— Merci. »

Le Labrys tira encore à quelques reprises contre les vitres, certes de façon à ne pas risquer de toucher Némy ou Ada, mais cette dernière regardait tout de même les fissures augmenter avec un air anxieux tandis que, des deux côtés du couloir, les sas les plus proches se refermaient.

« Ne t'en fait pas, fit Némy. On a déjà fait la manœuvre plusieurs fois sans souci. Moins d'une minute dehors, et maman nous récupère. Ce n'est pas comme si c'était le vide absolu, ça devrait le faire.

— Ouais, répondit Ada, moyennement convaincue. Au fait, tu réagirais comment si je te disais que j'étais effectivement une cyborg ? »

Némy attrapa sa main pour la rassurer.

« Je maintiens ce que j'ai dit. Si t'es une machine, je suis une putain de vampire. »

Ada plongea les yeux dans ceux de la blonde et prit une inspiration.

« Je suis une cyborg. »

Némy arbora un grand sourire, et Ada remarqua pour la première fois les deux canines légèrement surdéveloppées.

« Pour être franche, je m'en doutais un peu. C'est pas plus mal, pour tout dire.

— Pourquoi ?

— Cette méthode d'exfiltration, on ne l'a pas trop testée avec des humains. »

Némy jeta un coup d'œil sur sa cigarette, décida qu'elle avait dorénavant atteint le stade de « mégot » et la jeta par terre. Comme en réponse, le Labry tira une nouvelle rafale, et les vitres explosèrent.

Alors qu'elle était expulsée violemment à cause de la dépressurisation, et pour la première fois de son existence, ce fut la première moitié de son corps partiellement biologique et partiellement électronique qu'Ada se surprit à regretter.

Nouvelle : Le coming-out

, 01:14

Juste un petit post pour signaler que j'ai soumis une de mes nouvelles sur le concours prix littéraire «Au féminin», et que du coup vous pouvez la lire là (et éventuellement voter pour elle s'il se trouve que vous aimez et que ça ne vous gêne pas que le «vote» se fasse par un «like» Facebook, avec l'aspect collecte de données et tout ça que ça implique — ouais, il paraît que je ne suis pas très douée pour me vendre).

Bon après c'est un peu pathétique parce qu'en fait ce n'est pas vraiment le genre de concours littéraire qui m'intéresse trop à la base, et j'avoue que j'ai participé uniquement parce qu'il y avait des lots Harley-Davidson à gagner (mais pas de moto apparemment :/ ).

Sinon en ce qui concerne la nouvelle elle-même, qui est très courte et que vous pouvez lire rapidement, je tiens juste à dire que si elle reprend le personnage de Cassandra, la narratrice d'Une autobiographie transsexuelle (avec des vampires), et qu'elle se déroule (chrono)logiquement après les évènements relatés dans ce livre, ce n'est pas forcément cohérent avec la suite hypothétique que j'écrirai peut-être un jour. Oui, je sais, ce n'est pas bien, mais imaginez ça comme une sorte d'univers parallèle.