Le blog de Lizzie Crowdagger

Ici, je discute écriture et auto-édition, fanzines et livres numériques, fantasy et fantastique, féminisme et luttes LGBT ; et puis de mes livres aussi quand même pas mal
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Cinq astuces pour avoir une langue fictive dans votre roman sans vous embêter à créer une langue fictive

, 17:28

Quenya_Example.svg.png

Le saviez-vous ? JRR Tolkien lui-même
a commencé en griffonant des lettres
au pif et en faisant des blagues pour
inventer des mots, avant de créer des
justifications à postériori pour faire
sérieux et se la péter[réf. nécessaire].

Imaginons que vous écriviez un roman de fantasy ou de science-fiction, et qu’à un moment vos protagonistes rencontrent une peuplade étrangère. Quoi de mieux que de mettre une langue fictive pour augmenter le sentiment d’immersion ? Oui, mais voilà, vous avez autre chose à faire que de vous enquiquiner à inventer une nouvelle langue à partir de rien.

Ça tombe bien, dans cet article, je vais vous donner mes meilleures astuces pour faire croire que vous avez fait ce boulot !

Astuce #1 : ne pas mettre de langue fictive

Commençons par la méthode la plus simple : vous raviser, et ne tout simplement pas mettre de langue fictive. Pas de mots inventés, rien. Certes, ça peut être compliqué dans certains cas, mais pour le roman, en général on peut toujours se débrouiller dans mettre le moindre mot étranger (fictif ou pas) dans son texte. Après tout, soit les personnages parlent et comprennent la langue, et ça n’a donc pas forcément de sens de rendre un passage incompréhensible pour le lecteur ; soit ils ne la parlent pas, et il suffit de dire qu’ils ne comprennent pas ce qui est dit, qu’un autre personnage prononce un mot inconnu, etc.

Certes, on perd peut-être un peu d’immersion, et surtout vous perdez beaucoup de street-cred de vrai écrivain de fantasy si vous faites ça (pour peu que vous n’ayez pas mis de carte au début du livre, c’est la cata), mais ça reste une possibliité.

Astuce #2 : le rot13

Le principe du rot13 est de décaler toutes les lettres de l’alphabet de treize positions : A devient donc N, B devient O, etc. Vous pouvez coder/décoder en ligne sur beaucoup de sites, dont rot13.com. Ça ne marche pas forcément bien pour tous les types de langues, mais typiquement pour une incantation démoniaque ou ce genre de choses, ça donne un résultat qui ne marche pas trop mal. Par exemple, si vous tapez « Je mangerais bien des frites », vous obtiendrez :

Wr znatrenvf ovra qrf sevgrf

Bon, si on laisse tel quel, ce n’est pas forcément génial, mais vous pouvez toujours arranger un peu manuellement pour que ce soit un peu plus convaincant. Par exemple :

War znatrenv’f ovra qu’rf sevgrf!

Astuce #3 : écrire les mots à l’envers

Une autre astuce, si vous voulez simplement avoir quelques mots d’une langue étrangère fictive, c’est juste de prendre des mots et de les écrire à l’envers. Par exemple, pelleteuse deviendra esuetellep. Là encore, on peut faire un peu d’arrangement à la main pour qu ça rende un peu mieux.

DISCLAIMER : LES DEUX CONSEILS PRÉCÉDENTS SONT BIEN ÉVIDEMMENT IRONIQUES. N’IMPORTE QUEL ÉCRIVAIN QUI SE RESPECTE UN MINIMUM N’UTILISERAIT JAMAIS DES PROCÉDÉS AUSSI CHEAPS. EN PARTICULIER, LES PHRASES ET MOTS DE LANGUES ÉTRANGÈRES FICTIVES APPARAISSANT DANS PAS TOUT À FAIT DES HOMMES ONT ÉTÉ CONSTRUITES À PARTIR D’ANALYSES LINGUISTIQUES RIGOUREUSES ET CERTAINEMENT PAS EN UTIILISANT DE MÉTHODES AUSSI FEIGNANTES.

Astuce #4 : utiliser une langue réelle

Une autre méthode assez simple est, bien évidemment, d’utiliser une langue réelle. Pour des incantations ésotériques, le latin reste par exemple une valeur sûre. Un petit coup de Google Translate, et c’est marre. Ça peut aussi marcher pour des langues vivantes, d’autant plus quand vous vous inspirez déjà un peu d’un pays existant. Par exemple, dans Discworld de Terry Pratchett, les gens de Quirm parlent français. Évidemment, si vous avez un ton plus sérieux, il y a des chances que les gens viennent un peu pinailler et vous risquez, là-aussi, de perdre de la street-cred de vrai écrivain de fantasy, donc c’est à manier avec précaution. Oh, et aussi parce qu’on peut assez vite tomber dans des clichés racistes que vous allez avoir plus de mal à passer sous le tapis en disant « ah ah, non, mon peuple très clairement inspiré d’une culture existante est purement fictif et n’a rien à voir avec celle-ci, je ne sais pas ce que vous vous imaginez ! ».

Sinon, vous aussi pouvez aussi utiliser une langue construite, comme cette bande dessinée dont je ne me rappelle plus le nom qui a des démons qui parlent en espéranto.

Astuce #5 : utiliser une autre langue fictive

Mais quitte à utiliser une langue construite, pourquoi ne pas partir sur une langue fictive existante, comme l’elfique de Tolkien, le klingon de Star Trek, le dothraki de Game of Thrones, ou encore le créole belter de The Expanse ?

Ah, oui, il y a peut-être les soucis de copyright. Ce qui pose la question : est-ce qu’on peut copyrighter une langue, même si elle est fictive ? Si ça vous intéresse, il y a une interview en anglais de David J Peterson (qui a notamment travaillé sur les langues de Game of Thrones) qui parle un peu de ce sujet, et évoque la position de la Language Creation Society. En gros : ça devrait (idéalement) pas être soumis à copyright, mais si t’as du succès et que t’attires l’attention des potentiels ayants droits tu risque quand même d’avoir des soucis.

Et sinon…

Vous pouvez retrouver mes textes de fiction (qui, bien sûr, sont travaillés avec beaucoup plus de sérieux) sur mon site. Pour être au courant de mes dernières parutions, n’hésitez pas à vous abonner à ma newsletter (faible trafic, pas plus d’un message par mois). Pour me permettre de pouvoir continuer à diffuser des textes et de très bons conseils d’écriture, vous pouvez me soutenir sur Tipeee à partir d’1€ par mois, ce qui vous donnera accès à mes prochains textes de fiction en avant-première.

Quelques astuces pour l'impression de fanzines

, 15:17

Articles précédents dans la série :

  1. L’auto-édition, pourquoi ?
  2. Typographie, composition et mise en page
  3. Le format EPUB

Cette fois-ci, je voudrais faire un retour d’expérience sur quelque chose qui est rarement abordé dans les conseils pour auto-édité·e·s, ce qui est un peu dommage parce que c’est quand même une méthode Do It Yourself plutôt chouette pour avoir des exemplaires papiers de ses textes (surtout pour des nouvelles) : l’impression de fanzines.

Pré-requis

Évidemment, avant d’imprimer, vous aurez besoin d’avoir une version maquettée, a priori en PDF. Il vous faudra ensuite trouver une boîte à copies (la Corep étant à ma connaissance la plus grande chaîne du genre) pour faire vos impressions. Et là… ça dépendra…

Le cas idéal

Dans le cas idéal, vous aurez une boîte à copies qui dispose d’une de ces imprimantes tout en un qui est directement capable d’imprimer des brochures. À partir d’un fichier au format A4 ou A5 au format « classique » (avec les pages dans l’ordre : 1, 2, 3, … N), elle pourra imprimer des exemplaires au format A4 plié en deux. Pas juste de les imprimer, d’ailleurs, mais aussi de les relier et de les agrafer.

Autant dire que si vous avez ça à côté de chez vous, pour l’impression de fanzines, c’est Noël. Pas besoin de s’embêter, vous pouvez lancer l’impression de cinquante fanzines à la suite, aller manger un kebab, et revenir les récupérer pliés et agrafés. Franchement, c’est le top.

L’imposition (des mains)

Maintenant, dans la plupart des boutiques où je suis allée, il faut se contenter d’imprimer en recto-verso, et plier et agrafer soi-même. Et, surtout, il faut présenter un fichier au format brochure, avec les pages dans un ordre différent pour que ça tombe bien, avec la première et la dernière page au format A5 en vis-à-vis sur la première page au format A4, la seconde et l’avant-dernière sur la deuxième, etc.

Ce procédé s’appelle apparemment l’imposition, et il y a des logiciels qui vous permettent de faire ça, comme BookletImposer en mode interface graphique, ou, sous Linux, si vous avez installé le logiciel pdfjam, avec la commande suivante :

pdfjam entree.pdf --booklet true --landscape --outfile sortie.pdf

Attention : dans le premier cas, il faudra choisir pour l’impression recto-verso « retourner sur le bord court », alors que dans le second ce sera « retourner sur le bord long ». Dans tous les cas, mieux vaut faire un premier test avec un fichier qui ne fait pas trop de pages et sans lancer l’impression à 20 exemplaires…

Et si on n’a pas de recto-verso ?

S’il n’est pas possible d’imprimer en recto-verso, il est évident que ça se complique. Si c’est juste pour tester chez vous et que vous avez une imprimante qui ne fait pas ça, normalement lorsque vous faites « imprimer » vous avez une option « imprimer les pages impaires » et « imprimer les pages paires ». Il suffit donc en théorie d’imprimer d’abord les pages impaires (ou vous pouvez commencer par paires, on s’en fout), puis de remettre les feuilles dans l’imprimante et d’imprimer les autres pages. En pratique, si vous êtes comme moi, il faudra trois ou quatre essais pour comprendre dans quel sens remettre les feuilles pour que ça marche.

La conversion au format brochure directement au moment de l’impression

Si vous avez de la chance, il est possible que les ordinateurs de votre boîte à copie aient une option pour convertir en brochure au moment de l’impression, vous pourrez donc vous passer de la partie « imposition des mains ». Cela dit, ça demande d’utiliser un ordinateur plutôt que de brancher une clé USB sur la photocopieuse/imprimante, et dans beaucoup d’endroits ça vous coûtera le double en unités sur votre carte. Donc, voilà, la conversion faite à l’avance mise sur une clé USB, ça permet des économies.

Et pour le A6 ?

Ok, là on rentre dans un monde de douleur, parce que je n’ai pas trouvé de ligne de commande ou de programme en interface graphique simple qui permettent de faire directement du A6 correctement, où il suffit ensuite de massicoter et de plier.

Le plus « simple » que j’ai trouvé est de commencer par générer votre brochure A5, comme pour l’étape précédente. Il vous faudra ensuite installer un paquet supplémentaire, pdftk, et exécuter la commande suivante pour dupliquer chaque page de la brochure :

pdftk A=brochure_a5.pdf shuffle A A output brochure_dup.pdf

(C’est peut-être possible de faire ça avec pdfjam, mais si c’est le cas je ne sais pas comment.)

Ensuite au lieu de mettre les pages dupliquées à la suite les unes des autres, on va les mettre sur une seule page, en les réduisant de moitié :

pdfjam brochure_dup.pdf --nup 1x2 --outfile brochure_a6.pdf

Cette commande correspond à une imposition en mode « paysage », si vous avez utilisée la commande pdfjam ci-dessus pour l’imposition. Si vous avez fait une imposation en mode « portrait » (en utilisant BookletImposer, par exemple), il faudra mettre --nup 2x1 (deux colonnes, une ligne) au lieu de --nup 1x2 (une ligne, deux colonnes).

Une fois que vous avez fait ça, vous avez la même brochure que votre brochure A5, mais réduite de moitié et avec deux pages par page ; vous n’avez donc plus qu’à l’imprimer, à massicoter au milieu, et à replier chacune des deux parties.

Du moins, en théorie. Si vous êtes comme moi, vous allez merder une paire de fois avant et jeter quelques centaines de pages à la poubelle, et vous dire que le format A5 c’est quand même pas si mal.

Si vous connaissez une méthode plus simple qui ne nécessite pas de passer par des lignes de commandes, n’hésitez pas à le signaler en commentaire.

La couverture

Le plus facile, pour avoir une couverture un peu jolie, est d’en faire un fichier séparé. Pour ça, j’utilise personnellement Inkscape, mais vous prenez ce que vous voulez.

Si vous voulez faire une brochure A6, une fois que vous avez votre couverture A5 (deux pages A6 côte à côte), vous pouvez répéter les mêmes lignes de commande que ci-dessus. Ou, alternativement, juste changer la dimension de la page dans Inkscape (ou le programme que vous utilisez) et faire un copié/collé manuel, vu qu’il n’y a qu’une page.

Avoir des fichiers séparés pour la couverture et le texte présente plusieurs avantages.

  • Déjà, les logiciel utilisés pour la mise en page d’un livre et pour faire de la manipulation graphique ne sont pas forcément les mêmes.
  • Si vous mettez tout dans le même fichier, il faudra vous assurer de laisser éventuellement des pages blanches à la fin si votre nombre de pages n’est pas un multiple de 4, pour que la quatrième de couverture tombe au bon endroit. (En plus, ça vous coûtera deux unités de plus si vous ne mettez rien au verso de la couverture, mais là on commence à chipoter.)
  • Avoir des fichiers séparés permet d’imprimer la couverture sur du papier différent (plus épais, ou coloré, ou …), ou encore de l’imprimer en couleur alors que le texte est en noir et blanc. Les impressions couleurs coûtent cher, donc autant ne le payer que pour une page A4 plutôt que pour toute la brochure.

Note sur l’impression couleur

Si vous le pouvez, prévoyez d’emmener les fichiers sources, modifiables, avec vous, et pas juste les versions PDF, en particulier pour la couverture. Le niveau des couleurs dépend énormément d’une machine à l’autre, et ça peut être bien si vous pouvez ajuster sans avoir à rentrer chez vous parce que vous êtes tombée sur une imprimante qui donne dans le super sombre.

À titre d’exemple, voici l’image originale de la couverture fanzine de Good cop, bad cop, épisode 2 de La chair & le sang :

episode_02_a4.png

Et l’impression couleur de la même image une fois à la Corep :

Et, enfin, la version imprimée après modification en urgence des couleurs :

corep_2.jpg

Ah, et dans le genre conseil pratique idiot : essayez de venir suffisamment longtemps avant la fermeture. Personnellement, je me retrouve toujours à devoir finir mes impressions en urgence parce que je me suis dit « si j’arrive une heure avant la fermeture, ça va, j’aurai le temps de tout faire ».

Pliage et agrafage

Bon, là-dessus je me sens moins compétente, mais vu que c’est un retour d’expérience, allons-y quand même.

Parfois, vous aurez la chance d’avoir une agrafeuse adaptée à votre disposition, mais sinon vous devrez faire l’acquisition d’une agrafeuse à bras long, pour pouvoir planter les agrafes au milieu de la page A4. Ne faites pas comme moi, achetez les agrafes en même temps plutôt que devoir y retourner deux fois pour d’abord acheter de mauvaises agrafes, puis les bonnes.

Pour ce qui est du pliage, je ne sais pas s’il y a une méthode plus recommandée qu’une autre. Au départ, j’avais tendance à plier les brochures par morceaux, trois feuilles à la fois, en me disant que ça permettrait une meilleure pliure. Maintenant, j’agrafe avant de plier, et je fais tout d’un coup. Non seulement c’est plus rapide, mais j’ai l’impression qu’en plus les feuilles sont un peu mieux alignées et que c’est plus facile d’avoir les agrafes qui tombent bien sur la pliure plutôt qu’un peu à côté.

Mais honnêtement, j’ai toujours été nulle en pliage, donc ne m’écoutez pas forcément.

(Accessoirement, au moment de joindre la couverture au texte, pensez à vérifier que c’est bien dans le même sens. Oui, c’est le genre de conneries que j’ai faites pas plus tard qu’aujourd’hui…)

Améliorations possibles

(Ajout du 1er avril 2018)

Si vous imprimez une couverture qui a un fond coloré ou qui prend toute la page, il y a des chances que l’imprimante vous ajoute des bandes blanches (marges) sur les côtés de la feuille, que vous pourrez trouver plus ou moins seyantes. Pour vous en débarrasser, vous pourrez évidemment opter pour le massicotage. Même si ces marges sont moins gênantes pour l’intérieur, pensez également à massicoter celui-ci pour ne pas avoir une couverture trop petite…

Et si vous voulez vraiment avoir quelque chose qui soit nickel, il faudrait idéalement décaler légèrement les marges intérieures et extérieures des pages les plus loin du pliage, afin de compenser par la partie de la page « mangée » par la pliure (et en massicotant une fois les pages pliées pour éviter que les pages du milieu ne « ressortent » un peu par rapport aux pages extérieures). Personnellement, j’avoue ne pas avoir essayé parce que je trouve que ça devient un peu compliqué pour de l’impression de fanzines DIY, mais j’ai vu sur un forum l’existence d’un script, pdflivre.sh (que je n’ai pas testé) qui promettait de faire cela pour vous (le décalage des marges, en tout cas, pas le massicotage, il ne faut pas pousser).

Conclusion

Bref, les fanzines, c’est cool, le format A5 (A4 plié en deux) reste assez simple à produire et donne des trucs qui sont (je trouve) assez sympas, mais on peut varier un peu les formats, soit en misérant avec du A6, soit en mode « journal » avec du A4 (impression sur du A3, plié en deux).

Évidemment, le mode plié et agrafé est surtout adapté pour les livrets de taille raisonnables. Vingt pages, c’est bien. Soixante pages, ça commence à devenir limite et à mettre l’agrafeuse à rude épreuve. Donc ce n’est pas adapté pour tout, mais pour des textes courts, et notamment des nouvelles, je trouve que c’est un moyen d’impression plutôt chouette.


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Billets connexes

Neuf conseils pour écrire des personnages LGBT de manière inclusive

, 16:05

Il est extrêmement difficile d'écrire des histoires avec des personnages LGBT. Comme on m'a souvent demandé des conseils sur ce sujet (ce qui est bien normal), j'ai décidé de vous livrer neuf règles à suivre afin de produire une œuvre inclusive.

Remarque : ces conseils ont été rédigés pour des personnages LGBT, mais la plupart sont également valides pour écrire des personnages d'autres groupes inhabituels. N'hésitez pas à les adapter aux questions de sexisme, racisme, handicap, classe, âge, etc., pour avoir une œuvre encore plus inclusive !

1) Détaillez les personnages LGBT que vous incluez

À des fins d'inclusivité, il est vital que vous listiez rigoureusement dans tout résumé du livre tous les personnages LGBT que vous incluez, ainsi que leur « catégorie » spécifique. C'est très important pour deux raisons :

  1. Imaginez qu'un lecteur ouvre votre livre et ne soit pas au courant, commence à s'identifier au personnage, puis réalise qu'il est gay. Ou, pire, qu'il fantasme sur une de vos héroïnes, tout ça pour réaliser à la moitié du roman qu'elle est transsexuelle ! Vous voulez éviter ce genre de désagrément, qui peut pousser un lecteur à refermer un livre et à faire des commentaires négatifs, et qui est une approche qui manque clairement de pédagogie.
  2. De leur côté, les personnes LGBT ne s'intéressent pas vraiment à l'histoire et veulent juste qu'il y ait quelqu'un de leur groupe qui soit représenté. Savoir s'il s'agit de fantasy épique, de science-fiction policière, ou de romance historique est accessoire, ce qui compte est de lister précisément les identités représentées. Ne dites pas ce roman inclut des personnages LGBT, détaillez au maximum : ce roman inclut deux lesbiennes, un homme trans et un bisexuel. Ou, mieux : ce roman inclut deux lesbiennes, une végétarienne féminine et une sadomasochiste androgyne, un homme trans asiatique et un bisexuel qui a des traits autistiques.

2) Documentez-vous

Les personnes LGBT sont compliquées. Pour inclure des personnages LGBT dans votre histoire, il est donc nécessaire de bien vous renseigner. Vous pouvez faire cela en allant poser des questions aux personnes LGBT que vous connaissez, elles adorent toujours répondre à des questions. Le mieux, cependant, est de repérer un·e écrivaine LGBT pour lui demander comment faire pour écrire votre histoire. Attention : même s'il ou elle est écrivain·e, il ou elle est avant tout LGBT et donc (cf point 1) ne s'intéresse pas à l'histoire, mais aux détails identitaires des personnages que vous souhaitez inclure. Surtout, faites-lui bien comprendre que vous le/la contactez uniquement parce que vous savez qu'il/elle est LGBT : les écrivain·e·s LGBT restent avant tout des homos et/ou des trans, et n'aiment pas beaucoup qu'on les considère comme quelque chose d'autre.

3) Partagez doctement tout ce que vous avez appris

Ce serait purement du gâchis s'il y avait des éléments que vous aviez appris qui n'apparaissaient pas dans votre roman. Par ailleurs, ce serait perdre les lecteurs s'il y avait des éléments qui n'étaient pas bien expliqués : imaginez un film ou un livre sur les militaires qui ne détaillerait pas précisément le code gestuel ou les abréviations qu'ils emploient ! Non, il est nécessaire de bien expliquer tous les points qui pourraient ne pas être connus d'un lecteur hétérosexuel ou cisgenre. Par conséquent, pensez à bien détailler tout ce que vous savez dès que vous avez un personnage LGBT. Par exemple, il serait tout à fait malvenu d'avoir un personnage trans sans détailler son traitement hormonal, les chirurgies qu'il ou elle a faites, ou encore les procédures pour les obtenir. Une œuvre qui inclut des personnages LGBT n'a pas à avoir comme objectif premier d'être intéressante, mais pédagogique. Toute information compte, même si, après toutes vos recherches, elle peut paraître triviale : votre lecteur ou lectrice n'est pas aussi éduqué·e que vous. Par exemple, si vous avez un personnage de gay folle, pensez à bien préciser qu'il y a aussi des gays plus masculins. Cela dit, c'est un mauvais exemple, car...

4) Évitez les clichés, c'est-à-dire les personnages LGBT qui font trop communautaires

Il est important de ne pas trop perdre le lecteur en lui montrant des personnages qui révèlent du cliché. Donc, en réalité, évitez les folles, les butches, etc., et préférez des personnages LGBT qui soient un peu plus normaux. Après tout, on n'a pas envie de reproduire des clichés homophobes en faisant croire qu'il existe véritablement une communauté LGBT qui a développé des codes à elle.

5) Ne mettez pas trop de personnages LGBT

Les personnes LGBT évitent consciencieusement de traîner entre elles, ou de discuter entre elles : elle préfèrent, comme tout le monde, la compagnie des hétérosexuels cisgenres. Par conséquent, si vous avez un personnage LGBT, il ne serait pas très réaliste qu'il ou elle ait des ami·e·s LGBT. Les LGBT ne se regroupent jamais entre elles et eux, c'est un cliché homophobe. Bien sûr, cette nécessité de réalisme (on n'a, après tout, jamais vu de groupes entièrement constitués de gays ou de lesbiennes !) peut être légèrement assouplie si vous souhaitez être très inclusi-f-ve, mais pensez à tout de même à mettre un certain nombre de personnages normaux. Ne pas le faire pourrait être très contre-productif : imaginez que vous vous donniez le mal d'écrire un roman où l'intégralité des personnages soient LGBT, et que le lecteur en vienne à considérer cela comme normal et plus exceptionnel : vos efforts d'inclusivité ne seraient pas perçus à leur juste valeur.

6) Ne faites pas commettre d'actes répréhensibles à vos personnages LGBT

Dans une démarche inclusive, il est important que vos personnages LGBT soient présentés sous une lumière positive. Pour cela, évitez de leur faire commettre des actions immorales : ce serait homophobe ou transphobe. Par dessus tout, évitez absolument d'avoir un ou une antagoniste LGBT. Ne vous fiez pas à la popularité des anti-héros ou au fait que pour pas mal d'œuvres, le personnage que les gens préfèrent est le méchant : les règles de jugement moral dans la fiction sont tout à fait les mêmes que dans la réalité, et il est donc nécessaire que vos personnages LGBT se comportent de manière exemplaire pour ne pas véhiculer des clichés homophobes.

(À titre exceptionnel, on peut se permettre qu'un personnage LGBT effectue un acte légèrement immoral (comme employer une insulte problématique), à condition qu'il ou elle fasse amende honorable par la suite. Cela permet de montrer que la déconstruction est un processus permanent.)

7) Si rien n'indique dans l'œuvre qu'un personnage est LGBT, pensez à le préciser en dehors de l'œuvre

Imaginons que vous ayez un personnage LGBT, mais que rien n'indique dans votre œuvre qu'il ou elle est LGBT. C'est évidemment une erreur : vous avez mal appliqué les conseils 1) et 3). Heureusement, tout n'est pas perdu, et vous pouvez encore clamer que votre personnage qu'on ne voit avoir que des relations hétérosexuelles est en réalité pansexuel, ou que votre héros qui a tout d'un homme cis hétéro se pose des questionnements sur sa non-binarité, même si cela n'apparaît dans aucun des textes que vous avez écrits.

Astuce : personne, à part vous, n'étant dans votre tête, vous pouvez aussi décider rétroactivement qu'un personnage était en réalité LGBT, pour transformer une œuvre non-inclusive en œuvre inclusive. Si quelqu'un vous fait remarquer que, tout de même, rien ne laissait présager que le personnage était LGBT, et doute de votre sincérité, répliquez-lui que c'est parce que les homos sont des gens comme les autres et que douter de vous ainsi est profondément homophobe.

 8) Il est important que vous expliquiez en quoi vous êtes concerné·e ou pas

À partir du moment où vous mettez en scène des personnages LGBT, il est vital que tout le monde sache si vous êtes LGBT ou pas, et, si oui, quelles cases vous cochez et lesquelles vous ne cochez pas. Deux cas de figure :

  • Vous n'êtes pas LGBT, auquel cas il est important de faire savoir à tout le monde que vous avez produit des efforts surhumains pour écrire votre œuvre. Accessoirement, cela vous permet d'éviter que les gens pensent de vous que vous êtes un pédé.
  • Vous êtes LGBT, auquel cas, à partir du moment où vous déballez votre vie personnelle en mettant en scène des personnages qui sont également LGBT, les gens ont bien le droit d'avoir accès à votre intimité. C'est tout de même la moindre des choses.

(Ces deux cas de figures s'appliquent de manière différenciée suivant les différentes lettres que vous incluez. Par exemple, si vous êtes une lesbienne cis, et que vous incluez des lesbiennes ainsi que des personnages trans, vous devez préciser que vous êtes vous même lesbienne et accepter de répondre aux questions sur ce qui est autobiographique ou pas[1], mais vous pouvez dire que vous êtes cis pour a) ne pas risquer de passer pour une femme trans b) que le travail de documentation que vous avez dû réaliser pour apprendre des choses sur les personnes trans soit reconnu à sa juste valeur.)

9) Expliquez à quel point écrire des personnages LGBT est difficile

Dans tous les cas, il est nécessaire que vous expliquiez à quel point il était compliqué d'écrire une œuvre avec des personnages LGBT, et que cela relève d'une démarche volontariste d'inclusivité et que ce n'est certainement pas une idée qui vous serait passée par la tête naturellement. On ne voudrait pas laisser croire que pour écrire correctement une histoire avec des personnages LGBT, il suffirait d'avoir une bonne histoire, de mettre des personnages qui sont homos ou trans, et d'éviter d'être homophobe ou transphobe. Il est donc nécessaire d'expliquer à quel point ce procédé vous a demandé du travail surhumain, de la déconstruction, un travail de recherche dantesque, etc. Après tout, n'importe qui peut sans problème écrire des histoires avec des guerres, de la géopolitique, des explications plus ou moins scientifiques, mais comme, contrairement à ça, les personnes LGBT ne sont pas quelque chose qu'on croise tous les jours, inclure des personnages LGBT demande un véritable travail de recherche qui n'est pas donné à tout le monde.


Si vous aimez ce que j'écris et que vous voulez me soutenir financièrement, il y a une page Tipeee où vous pouvez vous abonner à partir d'1€ par mois. En contrepartie, vous aurez accès à mes prochains textes de fiction en avant-première. Mon projet en cours est une série inclusive, safe, déconstruite et pédagogique, qui inclut les identités suivantes :

  • une lesbienne masochiste ;
  • une pansexuelle top ;
  • une skinhead lesbienne (que je dois réécrire car elle est grosse et masculine et qu'on m'a fait remarquer que c'était un cliché lesbophobe) ;
  • une femme noire asexuelle et aromantique ;
  • un homme bisexuel qui a un trouble obsessionnel compulsif.

(Accessoirement, la plupart de ces personnages sont des vampires ou des loups-garous, mais c'est tout à fait accessoire à l'intrigue.)

Vos dons sont nécessaires car écrire sur des identités si particulières de manière inclusive et respectueuse me demande un effort approfondi de documentation et de déconstruction qui nécessite un travail long et difficile.


Note

[1] Et, soyons honnête, l'essentiel de votre histoire est autobiographique, non ? Quand les minorisé·e·s écrivent des histoires de minorisé·e·s, c'est forcément autobiographique, c'est bien connu.